Ce 20 juin 2023, au Tribunal de grande instance Ouaga 2, le procès des
présumés terroristes se poursuit. S.S et O.S, un père et son fils, sont poursuivis
respectivement pour « complicité d’association de malfaiteurs en lien avec
une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs en lien
avec une entreprise terroriste, entrainement au terrorisme dans un pays
étranger ». S.S, le père, échappe de peu à une peine de prison, pour
infraction non constituée. Quant à O.S, le fils, il écope d’une peine 22 ans de
prison dont 15 ans fermes.
Appelé à la barre, le père avance et prête l’oreille pour écouter la
lecture de l’ordonnance de renvoi tandis que le fils, assis derrière lui, balance
ses pieds comme s’il était dans un parc d’attraction, apparemment très peu
conscient de la situation. L’histoire remonte à 2016, lorsqu’après l’obtention
de son « BEPC et son entrée en
classe de seconde », O.S, le fils, s’intéresse particulièrement à la religion. Son
cousin l’envoie au Mali parce qu’il souhaitait renforcer ses convictions
religieuses. Mais il s’est finalement retrouvé au Nord-Mali. Surprise ! A
son arrivée, ce n’est pas ce qu’il croyait. La religion a été reléguée au
second plan. Le jeune de 24 ans dit s’être formé au maniement des armes
à feu et avoir suivi une formation en « saut d’obstacles » durant un
mois. “Arrivé là-bas, ce n’était pas l’étude de la religion que je faisais.
Et je ne connaissais pas le lieu ; donc j’y suis resté”, dit-il aux
juges.
De retour au Burkina, il se rend à Bobo pour étudier les enseignements
religieux pendant 11 mois. Il retourne ensuite chez lui, auprès de ses parents.
On fera appel à lui un an plus tard. Cette fois, il ira se former dans une
localité située au Nord du Burkina en soins infirmiers. "L'objectif de
cette formation était de soigner les personnes blessées lors des attaques",
explique-t-il. Il intègre un groupe terroriste dont la base est située à Bouma,
dans la région du Nord. "J'ai soigné des personnes du groupe blessées
par balles", précise-t-il.
Tout semblait se dérouler sans entrave pour lui jusqu'au jour où son cousin
meurt lors d'une attaque terroriste perpétrée par le groupe, suivie d’une
riposte des FDS.
S.S, le père, est informé que son neveu, qui était dans cette zone, a été
tué. Mais il ne savait pas la raison. Il appelle son fils O.S afin qu’il le
conduise sur les lieux. A leur arrivée, ils sont logés dans une base
terroriste. "Ils avaient tous des armes. J'ai alors compris qu'ils menaient
des activités pas du tout honnêtes", déclare le père.
Après quatre jours passés dans cette base terroriste, il décide de rentrer
à Ouagadougou en attendant que son fils le rejoigne. "Mais pourquoi à
votre arrivée, vous ne les avez pas dénoncés auprès de la police ou de la
gendarmerie ?", demande le président du tribunal. "J'avais
peur, pour moi et pour les enfants. Comme j'y étais moi-même, j'avais peur
d'être mêlé à tout cela si jamais je les dénonçais". Autre question : "Leur avez-vous
promis de ne pas les dénoncer ?", interroge le juge. "Non,
pas du tout ; je ne leur ai rien promis", réplique-t-il.
"Saviez-vous que si tout le monde devait, comme vous, refuser de dénoncer
ces terroristes par peur, on ne pourrait pas vivre dans ce pays ?", relance
le juge.
"Il n'a pas daigné porter l'information aux autorités compétentes,
afin qu'elles mettent fin aux agissements de ces derniers", renchérit le procureur. Ce n'est
que le 21 juillet 2021, que le père et son fils seront mis aux arrêts à Tanghin,
un quartier de Ouagadougou.
Le procureur a requis la relaxe en faveur du père « pour infraction
non constituée ». Et contre le fils, une peine de 21 ans dont 15 ans ferme
et une sûreté de 10 ans, plus une amende de 2 millions FCFA. Le père est
finalement relaxé par le tribunal « pour infraction non constituée ».
Son fils, lui, est condamné à 22 ans de prison dont 15 ans fermes.
La Rédaction