Accusés,
levez-vous ! Ce 11 octobre, de nombreux témoins vont défiler devant la
barre du Tribunal militaire de Ouagadougou. Certains ont activement participé
au coup d’Etat du 15 octobre 1987. Eliminant ainsi le leader de la Révolution,
Thomas Sankara, et douze de ses compagnons présents, ce jour-là, dans la salle
de réunion du Conseil de l’Entente. D’autres, militaires comme civils, ont été
des acteurs de l’ombre, tirant, par moments, les ficelles. D’autres encore ont
vu ou entendu «des choses». Ils veulent livrer leur part de vérité pour que
justice soit rendue dans cette affaire qui plombe la République depuis plus de
trente ans. Des témoignages forts ont déjà été livrés au juge. Nous vous
proposons, à l’occasion de ce procès historique, de larges extraits
d’auditions, à la lumière d’une analyse juridique des faits. Premier élément
clé : les véhicules qui transportaient les assaillants sont partis du
domicile de Blaise Compaoré. Voici la suite.
«De
la responsabilité pénale des personnes mises en examen
Attendu que les personnes mise en examen ne
reconnaissent pas les faits, à l’exception de Ilboudo Yamba Elysée qui déclare : «Le 15 octobre 1987,
vers 16 heures, on était au domicile de Blaise Compaoré, derrière l’Assemblée
nationale. Lui-même était à l’intérieur de sa maison (…) Nous, on jouait aux
boules et au damier devant la porte. Kafando Hyacinthe, Nabié N’Soni, Ouédraogo
Arzouma dit Otis et Maïga Hamidou sont sortis de la maisonnette dans laquelle
on dormait quand on était de service et où on gardait nos affaires et qui est
collée à la cour de Blaise Compaoré. Yacinthe Kafando a dit un tel, un tel
embarquez, on part au Conseil. Nabonsséouindé, Nacoulma Wampasba, Sawadogo
Idrissa ont embarqué, mais il y avait d’autres personnes dont je ne me souviens
pas. (…) J’étais chauffeur, Hyacinthe m’a dit de démarrer. Il était mon chef de
bord avec Idrissa et Nabonsséouindé derrière. (…) Maiga Hamidou avait la 504
blanche de Blaise Compaoré avec Nabié N’soni et Ouédraogo Otis dedans plus
d’autres personnes (I-219) ». Par la suite, il affirme : «Nous sommes
rentrés au Conseil à gauche par la grande porte. (…) Nous les avons dépassés et
nous sommes allés nous arrêter là où Blaise Compaoré dormait. Les gens sont
descendus, tout le monde, monter dans le bâtiment. (…) Pendant que je
manœuvrais pour aller garer le véhicule, les Hyacinthe sont redescendus et
Hyacinthe a dit : on part. Tous
ceux qui ont quitté le domicile de Blaise Compaoré et qui étaient dans les deux
véhicules ont encore embarqué (…). Au moment de passer devant le bâtiment où le
Président Sankara était en réunion, juste après le mât du drapeau à notre
droite, Maïga a virgulé avec son véhicule et est allé s’arrêter après le
couloir du secrétariat. Je voulais le suivre et m’arrêter derrière lui.
Hyacinthe Kafando m’a demandé: tu pars où ? En même temps, il a tiré sur
le volant, et on est allé cogner la porte du couloir du secrétariat. Les gens
sont descendus et ont commencé à tirer. (…) Ouédraogo Nabonsséouindé, Nacoulma
Wampasba et Sawadogo Idrissa ont tourné derrière, vers là où il y avait le
véhicule de sécurité de Sankara (I-222, P2) », qu’il précise :
« Nous avions tous chacun un fusil kalachnikov avec trois chargeurs plus
un pistolet automatique (PA). Certains avaient quatre chargeurs de kalachnikov.
Il y avait d’autres armes dans les véhicules, des RPG7 et des fusils
mitrailleurs (FM), mais on n’a pas tiré avec ». (I-219, I-222,
I-226) ;
Que
chacun restait sur sa position lors des différentes confrontations ;
Attendu cependant que les dénégations de
certains mis-en-cause sont contredits par d’autres mis-en-cause mais aussi par
de nombreux éléments concordants du dossier qui les accablent ; qu’en
effet, selon le témoin Traoré Alouna,
l’un des rescapés de la fusillade, sur interpellation-réponse, affirme :
«Ce que je sais de l’équipe qui nous a tiré dessus, c’était la sécurité
rapprochée de Blaise Compaoré. Il y avait Hyacinthe Kafando, Nabonsséouindé
Ouédraogo (Tél : ….), Arzouma Ouédraogo dit Otis et Nabié dont je ne me
souviens pas le prénom. Il y avait d’autres que je connaissais de visage mais
pas de nom (…) J’ai vu beaucoup de gens, y compris dans la salle où j’ai été
conduit en haut mais je ne connais pas leurs noms à tous. Je revoyais certains
parce qu’on se croisait mais je ne peux pas mettre un nom sur leurs visages
(I-34, p3 ».
Pour
le témoin Sawadogo P. Issouf, Ouédraogo
Nabonsséouindé et Nacoulma Wampasba étaient du commando de Kafando Hyacinthe
qui a mené l’action. Il explique : « En ce moment, j’ai vu Kafando
Hyactinthe qui courait du côté Ouest pour venir. J’ai fui aller me coucher côté
Est du bureau où j’ai trouvé l’un des chauffeurs civils du Président, du nom de
Gouem Abdoulaye. Il était couché, blessé. On était deux. Deux autres gardes
du corps du Président Blaise Compaoré se
trouvaient du côté nord ; on dirait qu’ils surveillaient le mur. Gouem
Abdoulaye pleurait en disant : ‘’je suis blessé, je suis blessé’’. Ils ont
tiré une rafale sur nous. C’était Ouédraogo Nabonsséouindé et Nacoulma
Wampasba. C’est eux qui ont tiré sur nous (I-57, p2) »
Traoré
Oumar, l’un des mis-en-cause ne dit
pas autre chose quand il déclare : « Avec ce que j’ai vu le 15 octobre
1987, et ce que j’ai appris par la suite, le commanditaire, c’est Blaise
Compaoré, à cent pour cent. Les
exécutants, ce sont les éléments
de sa sécurité rapprochée à cent pour
cent. Pour ceux dont je suis formel, Hyacinthe Kafando, Nabié Arzouma Otis,
Maiga son chauffeur, Nabonswendé. En ce qui concerne les civils, je venais
d’arriver de Pô, je ne connaissais pas les gens, ni ceux de l’entourage de
Blaise Compaoré (I-205, p2) »
Coulibaly
Bafassé (…) confirme : «Il y avait
d’autres du côté du garage où il y avait les véhicules avec les chauffeurs.
C’est eux qui ont abattu les chauffeurs mais je n’ai pas vu. Il y avait un
bâtiment qui nous cachait. Ouédraogo Nabonséouindé m’a expliqué après qu’il
était là-bas, de ce côté. Il ne m’a pas dit qu’il a tiré. Je ne sais pas ce
qu’il a fait (I-212, p2) »
Pour Sidouemba Claude,
ex-garde de corps du Président Sankara au moment des faits, « ce sont
les gardes de corps de Blaise Compaoré qui nous ont attaqués et qui ont tiré
sur nous. On travaillait ensemble, je les connais presque tous. Il y avait
Hyacinthe Kafando, Ouédraogo Arzouma Otis, Nabié N’soni dit quatre roues,
Nacoulma Wampasba, Idrissa Sawadogo ou Ouédraogo, Tondé Bangré, Yerbanga Salam,
le jeune Maïga (sans autre précision). On se connaissait tous bien avant le 15
octobre. Ils étaient armés de fusils kalachnikov. Hyacinthe, leur chef, avait
une arme différente, genre carabine avec lunette de visée, plus un pistolet
automatique (PA). Je suis ferme et catégorique que tous ces militaires que je
viens de citer faisaient partie de ceux qui
nous ont attaqué et qui ont tiré sur nous et le Président Sankara le 15
octobre. Je les connais tous et je les ai vus de mes propres yeux. C’est
Hyacinthe qui était leur chef (I-106, p2) »
Somda
Eugène (I-215, p3) ; N°57 :
«A l’entrée du Conseil, Boly s’est retourné sans que je sache. J’ai continué à
l’intérieur. Si je ne me trompe pas, au niveau du bâtiment du Togo, j’ai été
arrêté par Nabonsséouindé. J’étais armé et j’avais ma trousse en main. Il m’a
demandé qu’est-ce que je viens faire ici. Je n’ai pas répondu. Il a reposé la
question en m’intimant de déposer tout ce que j’avais. Je voyais Hyacinthe
Kafando à l’étage en train de me regarder et Maïga Hamidou était en bas, à côté
d’un véhicule garé devant la porte. La peur m’a saisi. Instinctivement, j’ai
réagi en disant que c’est le capitaine Diendéré qui m’a appelé. Nabonsséouindé
demande à Maïga si le Capitaine Diendéré m’a vraiment appelé. Maiga est rentré
à l’intérieur du bâtiment puis est ressorti. Ensuite, le capitaine Diendéré
aussi est sorti. J’étais toujours arrêté, mains en l’air, en face de
Nabonsséouindé. Maiga m’a dit d’avancer. Le capitaine Diendéré m’a
accueilli »
Ilboudo
Laurent (I-50, p2) : « Pendant
que nous étions à plat ventre, on a trainé Gouem Abdoulaye les jambes brisées
venir coucher à côté de nous. J’ai levé la tête vers le mur de clôture d’en
face qui était à environ cinquante (50) mètres et j’ai aperçu un soldat, je
crois que c’était Nacoulma Wampasba. Quand il m’a vu, il a lâché une rafale
dans ma direction. J’ai baissé la tête »
Zongo
Adama (I-315, p2) : «Ce jour, les
détenus sont venus pour les corvées aux environs de 14 heures et quelques-15
heures, au nombre à peu près d’une dizaine. (…) je voulais aller saluer Maïga
Pathé qui était assis sur le capot de leur véhicule 504. Il y avait, à côté de
lui, Ilboudo Yamba Elysée mon promotionnaire. Nabonsséouindé, garde du corps de
Hyacinthe, qui était vigile quand je l’ai croisé une fois à la CARFO, Drissa
qui travaillait après la fuite de Blaise Compaoré dans une mine d’or, Daniel
sans autre précision, (…) Ils étaient tous en tenue de sport mais avec leurs
armes, des fusils kalachnikov. Ils étaient au pied de l’aile Ouest du grand
bâtiment central orienté vers la porte d’entrée principale du Conseil, en face
de la villa en pierres où se trouvait le secrétariat du CNR, à quelques
quatre-vingt mètres de là. Le Président Sankara n’était pas encore arrivé (…)
Quand j’ai salué Maiga Pathé, je suis reparti pour m’occuper de mes prisonniers
pour les travaux de nettoyage. (…) Environ vingt minutes après, j’ai entendu
les coups de feu au Conseil. C’était la panique, j’ai laissé les prisonniers et
chacun s’est cherché ».
Zidouemba
Claude (I-85, p2) : « J’ai vu
Ouédraogo Otis revenir de vers la petite porte du Conseil qui donne sur l’ENAM.
Kafando Hyacinthe lui a demandé qui est sorti. Il a dit que c’est Bossobè. Hyacinthe a demandé s’il
ne l’a pas tué non ? Qu’il est au courant et il vient ici
aujourd’hui ».
Ilboudo
Laurent (I-50, p3) : « Il
y avait un autre de mes anciens éléments du nom de Traoré Bossobè. Il était
soldat de 1re classe. Il a déjà fait partie de mon groupe mais on
l’avait amené dans un autre groupe suite à un remaniement des groupes. Le 15
octobre 1987, je l’ai vu au Conseil; il était présent mais je ne sais pas à
quel titre. C’est après que j’ai appris que c’était un traitre, qu’il aurait
donné l’alerte à l’autre camp quand le Président Sankara est arrivé au Conseil.
Il a reçu une balle malheureusement, mais il a été vite évacué en France par le
régime Compaoré. Il serait dans son village à Banfora.
Kagambega
Aboulassé : « Pour ce qui
concerne l’arme qui a été sabotée, après les évènements, j’ai appris que
lorsqu’il y a eu les tirs, l’un des soldats qui était là est allé pour se
servir d’une arme, je crois un PKMS qui était sur un terre-plein affecté selon
la répartition des tâches dans notre organisation sécuritaire, à Traoré Bossobè
qui n’était pas là. Il n’a pas pu armer l’arme en question, une des pièces au
niveau de la culasse manquait. Traoré Bossobè s’est retrouvé au Conseil et a
été blessé. Apparemment, c’est lui qui a saboté l’arme parce qu’il était de
connivence avec les Kafando Hyacinthe »
Zongo
Etienne : « On avait leur plan. On savait qu’ils allaient
(attaquer) avant le 18 octobre, jour de l’ouverture du premier SIAO qui a
attiré du monde à Ouagadougou. On savait qu’ils faisaient les réunions avec
Traoré Bossobè. »
Somda
Eugène : « Je soupçonne
également Traoré Bossobè qui faisait partie du groupe qui nous a relevés le
matin du 15 octobre. Il nous a trahis. Il donnait les renseignements sur nous
au camp de Blaise Compaoré. J’ai également appris que Traoré Bossobè tenait des
réunions avec le groupe de Blaise Compaoré. Le Caporal Kani Fankani de mon
équipe, parent de Nabié N’soni et Traoré Bossobé, m’a avoué que Nabié N’soni
lui a dit que Bossobè faisait les réunions avec eux. Il y avait d’autres
personnes dont je ne me rappelle plus. Je revois la scène comme si c’était hier ».
Yoni
Amadou : « Concernant les
évènements proprement dits du 15 octobre 1987, c’est mon parent à plaisanterie,
feu le Sergent-chef Ouédraogo Ousmane, qui était Sous-officier de permanence ce
jour au siège du CNR qui m’a relaté comment les choses se sont passées. Ils
étaient en haut de l’étage et auraient tout suivi. (…) Entre temps, il a
entendu le crépitement des armes. En regardant, il a aperçu Nabié N’soni,
Ouédraogo Arzouma dit Otis, ensuite Hyacinthe Kafando en verres noires tout
furieux, criant sur ceux qui étaient restés dans la salle de réunion de sortir.
Il a ajouté qu’il y avait d’autres militaires de Hyacinthe derrière le bâtiment
sans dire c’était qui. (…) Il m’a demandé si je connaissais Traoré
Bossobè ; j’ai répondu par l’affirmative ; il a poursuivi en me
disant qu’ils ont tiré sur son bras. J’ai dit que c’était l’ami intime de Nabié
N’soni dit quatre roues et que
c’étaient entre eux, sinon ils allaient l’abattre au lieu de tirer sur son
bras. Il m’a parlé de Ouédraogo Nabonsséouindé et Nacoulma Wampasba (…) Il m’a
dit qu’ils les a vus faire le tour du bâtiment du secrétariat du CNR vers la
soute à munitions »
Mis
en examen Ilboudo Yamba Elysée : « Quand
on a quitté le domicile de Blaise Compaoré face à l’Assemblée nationale, nous
avons rejoint les deux voies goudronnées devant l’Assemblée nationale. On a
tourné à droite vers l’ancienne Présidence, passé devant la Présidence,
continuer tout droit et croiser la route de l’hôpital devant l’ancien INERA. On
a tourné à droite, en allant vers l’hôpital jusqu’à croiser la route qui passe
devant le Conseil de l’Entente. On a encore tourné à droite, avons pris cette
route et sommes rentrés au Conseil à gauche par la grande porte. On est passé
devant le bâtiment où Jean-Baptiste Lengani dormait en le laissant à notre
gauche. En bas, se tenait la réunion avec le Président Sankara. Il était dedans
avec les autres et certains hommes de sécurité dont Ouédraogo Wallilaye dehors
devant le bâtiment. D’autres étaient derrière le bâtiment avec le véhicule de
sécurité qui suit le Président. Je crois que Gouem Abdoulaye était là-bas. On a
fait le tour du grand bâtiment du Conseil de l’entente en le laissant à droite.
Le chauffeur de Sankara, Somda Der, était à l’ombre de ce bâtiment dans le
véhicule du Président et certains hommes de sécurité étaient arrêtés à côté du
véhicule, parmi lesquels il y avait Traoré Bossobè. Nous les avons dépassés et
nous sommes allés nous arrêter là où Blaise Compaoré dormait. Les gens sont
descendus, tout le monde, monter dans le bâtiment. Je voyais le capitaine
Diendéré Gilbert arrêté devant ses hommes qui étaient assis sur des bancs et il
leur parlait sous les hangars. Je ne sais pas qui et qui étaient là-bas avec
lui. Pendant que je manœuvrais pour aller garer le véhicule, les Hyacinthe sont
redescendus et Hyacinthe a dit : On
part. Tous ceux qui ont quitté le domicile de Blaise Compaoré et qui étaient
dans les deux véhicules ont encore embarqué. On a refait le chemin inverse
comme pour ressortir, en laissant le grand bâtiment à gauche. Quand on a
dépassé ce bâtiment, au moment de passer devant le bâtiment où le Président
Sankara était en réunion, juste après le mât du drapeau à notre droite, Maïga a
virgulé avec son véhicule et est allé s’arrêter après le couloir du secrétariat.
Je voulais le suivre et m’arrêter derrière lui. Hyacinthe Kafando m’a
demandé : tu pars où ? En même temps,
il a tiré sur le volant et on est allé cogner contre la porte du couloir
du secrétariat. Les gens sont descendus et commencé à tirer. Je suis descendu
et je cherchais à prendre mon arme. Quelqu’un d’autre l’avait pris. On a tiré
sur les gens en désordre. Je crois que c’est Wallilaye qui a été touché le
premier. Ouédraogo Nabonsséouindé, Nacoulma Wampasba et Sawadogo Idrissa ont
tourné derrière vers là où il y avait le véhicule de sécurité de Sankara. Je ne
sais pas ce qui s’est passé là-bas. Les Somda Der et autres dont je ne me
rappelle pas ont réagi en tirant et les Arzouma Otis les ont tirés dessus. Le
Président Sankara et Frédéric se sont suivis pour sortir voir. Sankara était
devant les mains en l’air. Il n’avait pas d’arme dans sa main. Il a croisé
Hyacinthe, Nabié et Maïga qui ont tiré. Je ne sais pas qui a touché le
Président Sankara le premier. Il s’est affaissé sur ses genoux avant de tomber sur
son côté gauche. Frédéric est tombé à côté de lui dehors devant la porte du
secrétariat qui donne directement sur la voie. Sankara était habillé en
survêtement rouge avec du noir. Il avait du blanc aussi. Le pantalon de
Frédéric était noir avec une chemise pagne … »
Sawadogo
Nonganéré : « Tout ce que je
sais, Hyacinthe Kafando est venu le matin voir Blaise Comparoé. Il était
conduit par Ilboudo Elysée »
Diallo
Ismaël Abdoulaye : «J’ai cherché à contacter
Blaise Compaoré. J’ai appelé le conseil, puis le ministère de la Justice. Il
n’y était pas. Je l’ai appelé à son domicile, et suis allé le voir peu avant 9
heures (à côté de l’Assemblée nationale). Il était en survêtement de sport. Je
lui ai demandé ce qu’il faisait à la maison à cette heure dans cette tenue ;
il m’a dit qu’il avait le palu. Je lui ai dit, sur sa terrasse, qu’il fallait
faire une déclaration aujourd’hui même pour dire que, chemin faisant dans la
révolution, le ver est entré dans le fruit mais que les leaders en ont pris
conscience et travaillent à nous ramener
à une situation normale. Il m’a demandé si j’ai vu Gilbert Diendéré sortir
quand moi je rentrais chez lui. Je lui ai répondu « non ». Il a
ajouté que c’est la première fois que Gilbert et lui parlent politique ».
Bassolé Hubert : « Arrivé au Conseil de l’Entente, je suis allé voir le chef de corps adjoint, le Lieutenant Diendéré Gilbert dans son bureau. Je lui ai demandé ce qui se passait. Il m’a dit exactement ceci : « Sankara avait décidé d’éliminer les chefs historiques et ces derniers ont décidé de l’éliminer ». Il ne peut pas contester m’avoir dit ça. Il me l’a dit personnellement dans son bureau. J’étais désemparé »
De la
présence de Diendéré Gilbert au Conseil de l’entente pendant l’action du
commando conduit par Kafando Hyacinthe contrairement à ses propres
déclarations
Diallo
Moussa : «Le 15 octobre, dans
l’après-midi, j’étais dans mon bureau dans l’enceinte de la cour de
l’Etat-major de la gendarmerie. J’avais reçu la visite d’un collègue nigérien
du nom de Ganda Moussa, également promotionnaire de Gilbert Diendéré aussi bien
à l’école préparatoire de Saint Louis qu’à Saint Cyr. Il voulait parler à
Gilbert Diendéré. J’ai appelé le standard du Conseil qui m’a passé Diendéré
Gilbert. Nous avons conversé brièvement et je lui ai passé Ganda Moussa. Ils
n’ont pas eu le temps de converser, la communication s’est coupée. Quand j’ai
rappelé, j’ai eu la standardiste qui m’a dit : Mon Lieutenant, ici ça
tire, je ne peux pas vous le passer, je suis sous la table. Je me suis levé, je
suis rentré chez moi, prendre mon fusil kalachnikov, mon véhicule et je me suis
rendu au Conseil pour comprendre. »
Lankoandé
Arzouma : « Je suis venu au
Conseil aux environs de 15 heures en tenue de sport. (…) J’ai continué aller
garder ma Puch-Oma et je suis monté au bureau trouver le dactylographe, le
soldat Ouédraogo Idrissa. (…) Je suis resté assis avec lui pendant un moment
avant d’aller sur la terrasse et je regardais dans la cour du Conseil. Entre
temps, Diendéré Gilbert passait, venant du grand bâtiment à trois ailes, quand
il m’a vu il m’a demandé ‘’Lankoandé y a quoi ?’’ J’ai dit ‘’il n’y a rien
mon Capitaine’’. Il a continué ; je ne sais pas s’il est rentré dans le
bâtiment ou s’il l’a contourné. Je suis resté
en haut du bâtiment sur la terrasse. Peu après, j’ai vu le cortège du
Président Sankara entrer. (…) Quelques temps après, peut-être quinze ou vingt
minutes, pas plus que ça, on a entendu des tirs de rafales d’armes
automatiques. »
Kongo
Inoussa : « Effectivement,
étant au Conseil, j’ai vu le cortège du regretté Président rentrer. Quelques
temps après, j’ai vu le Lieutenant à l’époque Diendéré Gilbert sortir de
quelque part dans les salles, lever la main et appeler. En ce moment, on était
en train de rabrouer le soldat Traoré Lamine, notre moniteur de sport, parce
qu’il était moniteur et chaque fois qu’il partait au stage, il échouait. Quand
le Lieutenant Diendéré a appelé, on lui a dit en même temps d’aller parce que
c’est lui qu’il appelait. Il est allé et est revenu dire que ce n’est pas lui mais
c’est moi. Je suis allé à lui. Arrivé au niveau du Lieutenant Diendéré, il a
continué d’avancer en direction du bâtiment où se trouvait le trésorier Konari
Dramane, en appelant le regretté Sawadogo Charles. Je me suis retourné le
suivre en marchant ; on était deux, côte à côte avec lui ; on
marchait et on rentrait dans le bâtiment. Il nous a dit : «La
situation est gâtée. L’ordre a été donné de nous attaquer ». J’ai rétorqué : «Qui
va nous attaquer ? Ce n’est pas le Président qui vient de
rentrer ? ». Il a dit ‘’oui’’. J’ai demandé qu’on aille le voir. On
avait commencé à aborder les premières marches de l’escalier du bâtiment. Il a
dit que ce n’est pas possible. En même temps, on a entendu les coups de feu.
Lui et Charles ont continué à monter sur le bâtiment. »
Le témoin Kongo Inoussa a confirmé ces propos lors de la confrontation avec
Diendéré Gilbert (I-295) p2 et 3. Mais sur insistance de Diendéré, il a fini
par dire que c’est plutôt la version de Diendéré qui serait la bonne, car il
était son chef au moment des faits. Il a réitéré sa même déclaration lors de la
reconstitution des faits au Conseil de l’entente le 13 février 2020 (scellé
N°8, I-476)
Traoré
Lamine (I-306, p12) : « J’étais
soldat et j’étais effectivement au Conseil ce jour-là. J’ai vu les véhicules du
cortège du Président Thomas Sankara entrer par la porte principale du Conseil
de l’Entente. Je ne sais plus combien de temps après, on a entendu les coups de
feu. (…) Le 15 octobre 1987, lorsque j’étais au Conseil pour faire le sport, j’ai
vu le Lieutenant à l’époque Diendéré Gilbert. Je l’ai vu entre le bâtiment Togo
et le bâtiment central. Kongo Inoussa était aussi là, en tenue de sport. Il
devait faire le volley ».
Gambo
Sibidou Léonard : « Je suis revenu pour préparer le cours que je
dispensais et j’étais dans mon bureau à l’étage du bâtiment Togo. Entre temps,
aux environs de 16 heures-16 heures 30, alors que j’étais concentré sur la
préparation de mon cours, j’ai entendu les premières rafales que j’avais
d’abord pris pour un incident de tir. Quand les tirs ont repris quelques
minutes plus tard, je me suis précipité en bas pour voir ce qui se passait.
J’ai rencontré mon chef Diendéré Gilbert qui m’a dit que l’Escadron de
transport et d’intervention rapide (ETIR) se préparait à monter sur nous et m’a
instruit de prendre les dispositions prévues en pareilles situations. En ce
moment, des tirs s’entendaient de toutes parts, aussi bien à l’intérieur du Conseil
que du côté de la Présidence du Faso. »
La
neutralisation de la FIMATS par les éléments du Conseil et de l’EMC est partie
du Conseil de l’Entente dont Diendéré Gilbert était le responsable.
Sanou
Mahamadou (I-420, p 2-3) : « (…) Oui, le
15 octobre 1987, j’ai effectué une mission à l’Ecole nationale de la police.
J’étais à l’aéroport quand Ouédraogo Tibo m’a appelé de venir au Conseil de l’Entente. (…) Je ne me
rappelle plus si nous nous sommes suivis, mais j’étais à l’école de police avec
les éléments de Tibo, les éléments de l’EMC qu’il commandait. (…) Nous avons
embarqué devant le Conseil où il y a les hangars servant de parking devant la
porte d’entrée principale. Le Lieutenant Ouédraogo Tibo était avec nous dans le
même véhicule et nous sommes partis. Arrivés, les policiers avaient un
dispositif tout autour du mur de l’école. Tibo est allé avec quelques éléments
dans la guérite de l’école de police. Les gradés de la police étaient réunis
là-bas. Etant le plus gradé après lui, j’étais sergent à l’époque, j’ai
continué dans la cour avec le véhicule. J’ai débarqué des hommes et je les ai
répartis tout autour de l’école de la police. Là où il y avait un policier,
j’ajoutais un de nos éléments militaires. »
Belemlilga
Albert : « Lorsque les tirs
ont cessé, j’ai essayé de sortir la tête pour voir ; j’ai aperçu Hyacinthe
Kafando, Nabié N’soni dit quatre roues. J’ai rejoint mon unité qui était basée
en face du Conseil de l’Entente, de l’autre côté de la voie, non loin du
domicile de Diendéré Gilbert. C’est de là que nous avons reçu les ordres de
notre chef Ouédraogo Tibo pour aller à la FIMATS. Comme beaucoup d’autres
camarades de l’Escadron Motocycliste Commando (EMC), c’est comme ça qu’on s’est
retrouvé là-bas ; nous qui étions membres des deux pelotons de l’EMC de
Ouagadougou, puisque chaque région avait un peloton de l’EMC sauf Ouagadougou
qui en avait deux »
Ouédraogo
Abel Macaire : « (…) Comme je vous
l’ai dit, un adjudant que je ne connaissais pas est venu avec des militaires du
CNEC à notre base au camp CRS à Gounghin le 15 octobre 1987 vers 17 heures.
C’est moi-même qui l’ai personnellement reçu et on a même échangé de ce que je
vous ai rapporté plus haut. Ensuite, ils ont investi notre camp. C’est en ce
moment qu’on m’a dit que c’est l’adjudant Tibo. Il était réputé à l’époque,
mais moi, je ne le connaissais pas physiquement. Ce n’était pas le 16 octobre
1987 mais bel et bien le 15 octobre 1987 au soir. Le 16 octobre 1987, nous
étions sous son commandement, d’ailleurs, depuis le 15 octobre 1987, dès qu’il
a investi notre camp »
Michel
Koama, chef de corps de l’ETIR, a été
tué par Somé Gaspard qui aurait quitté le Conseil de l’Entente pour arriver à
Kamboinsé selon de nombreuses déclarations concordantes.
Ouédraogo
Adama : « Le 15 octobre
1987, j’étais de garde avec Ilboudo François plus les anciens au nombre de
quatre ou cinq. Nous étions à la
barrière, croisement route de l’hôpital Yalgado Ouédraogo. Le chef de poste
était le Sergent-chef Ouédraogo Roland. J’ai appris qu’il est décédé. Aux
environs de 15 heures, j’ai vu le Lieutenant Somé Gaspard qui sortait du
Conseil. On l’a salué et, en même temps, il a fait demi-tour et repartir au
Conseil. »
Traoré
Morifing (I-426, p5) : «Avec le
recul, tout laisse croire qu’il y aurait eu une coordination après l’action du
Conseil pour neutraliser le chef de corps et l’ETIR par l’intermédiaire du
Sous-lieutenant Somé Gaspard et du Sergent Maïga Hamidou. Je pense même, à
écouter ce qui s’est dit, qu’il est possible que Gaspard soit venu du Conseil
après l’opération pour neutraliser le chef de corps et son unité. Il aurait été
vu passer. Il n’était pas à Kamboinsé, il est venu de Ouagadougou avec sa
moto.»
Ouattara
Hamidou (I-332, p2-3) : « De
nombreux témoignages affirment que quand Koama Michel est passé en tenue de
sport, il a été suivi par le lieutenant Somé Gaspard sur une moto, puis ils ont
entendu la détonation du coup de feu. Le gérant Nikiema Jean Paul du maquis
« Chez Jean Paul » en face des bâtiments Adaoua a dit qu’il a vu
Gaspard revenir de chez Koama Michel, après le coup de feu, prendre une bière
boire et est même parti sans payer. Il est clair que c’est Somé Gaspard qui a
abattu Koama Michel dans sa chambre pour éviter tout renfort à
Ouagadougou. »
Aliho
Joseph (I-340, p2) : « Quand
Maïga dit Makachi est revenu du Conseil, il avait beaucoup de pouvoir, on ne
savait même pas entre lui et Gaspard qui commandait le corps. Ils avaient des
affinités ; c’était une complicité terrible. Avant ça, on se demandait où
était le chef de corps. Elysée même ne connaissait pas sa position, puisqu’il
le recherchait pour avoir des ordres concernant ce que l’ETIR allait faire.
C’est là que la rumeur est venue que c’est le lieutenant SOME Gaspard qui a
suivi le chef de corps à son domicile aller le tuer. C’est pourquoi il n’est
plus revenu quand il a quitté le terrain pour aller s’habiller. »
Belemlilga Albert (I-357, p4) : « Après le 15 octobre
1987, j’ai eu à échanger plusieurs fois avec Somé Gaspard. Le 15 octobre,
lorsque je l’ai croisé à la station BP Kologh-Naba, il partait au Conseil pour
rendre compte à Diendéré Gilbert de ce qui s’était passé à l’ETIR à Kamboinsé.
Il m’avait dit qu’il avait tué son chef de corps Koama Michel dans sa maison
lorsqu’il s’habillait en tenue militaire et de dos. J’ai pris une bouteille de
whisky boire et je suis reparti au camp CRS. »
Hien
Sansan dit Kodio (I-237, p2) : « (…)
Dès transmissions, je suis revenu au Conseil pour prendre ma moto. C’est en ce
moment que j’ai vu le Capitaine Diendéré qui m’a appelé et m’a confié la
mission de sortir avec son chauffeur du nom de Tondé Ninda Pascal dit Manga
Naba, faire le tour des Corps pour leur
dire d’être en alerte. Nous avons fait le tour, la gendarmerie, le camp
Guillaume Ouédraogo, le Génie militaire, le Groupement Blindé. Je voulais qu’on
aille à l’ETIR mais Ninda Pascal m’a dit de ne pas aller là-bas. Nous sommes
repartis demander au Capitaine Diendéré. Ce dernier a dit qu’on a eu la chance,
que l’ETIR n’était pas prévu, qu’il ne
fallait pas effectivement aller là-bas. Après ça, j’ai été libéré et
j’ai rejoint les transmissions. »
Bassorobou
Apiou Pascal (I-345, p2) : « Dans
les environs de 22 heures, Diendéré Gilbert est venu aux transmissions. Il m’a
fait transmettre un message à Pô demandant du renfort qui est arrivé tard dans
la nuit. J’ai vu le lieutenant à l’époque Ouédraogo Ousséni, j’ai vu aussi
Ouédraogo Tibo et beaucoup d’autres militaires dont les noms m’échappent
actuellement. Ensuite, le Lieutenant à l’époque Diendéré Gilbert m’a envoyé aux
transmissions fil dans le bâtiment du secrétariat du CNR pour dire à Sawadogo
Boureima d’ouvrir la ligne de Kamboinsé (…) Après exécution, je suis revenu aux
transmissions rendre compte à Diendéré Gilbert. La ligne étant ouverte, je suis
revenu trouver Diendéré Gilbert en train de communiquer avec Kamboinsé ;
je n’ai pas entendu ce qu’il était en train de dire. »
Ouédraogo
Gombila dit Antoine (I-368, p2) : « (…)
des appels que j’ai reçus le 15 octobre 1987 dans la nuit et le lendemain, je
me souviens de ceux de Somé Gaspard qui appelait fréquemment le Conseil et je
lui passais Diendéré Gilbert. »
Bationo
Jean (I-268, p3) : « (…)
quand je me suis mis en tenue et je suis revenu au Conseil, je me souviens
avoir rencontré Zongo Alexis dit le Mono sur la voie goudronnée devant le
Conseil. (…) A l’intérieur du Conseil, je ne revois plus, en dehors de l’ancien
chauffeur de Diendéré Gilbert appelé Mang-Naaba. De la permanence, je le voyais
entrer et sortir à plusieurs reprises (…) »
Ouédraogo
Pierre (I-147, p4) : «Je me suis
rendu au Conseil de l’Entente dans la matinée du 16 octobre pour rencontrer le
Capitaine Blaise Compaoré à sa demande (…) On m’a fait attendre sous des arbres
qui se trouvaient face au bureau qu’occupait le Président Thomas Sankara. Pendant que j’étais assis,
l’eau ensanglantée coulait depuis le bureau, à travers le goudron et atteignait
les arbres. (…) J’ai été rejoint par Gilbert Diendéré à qui j’ai demandé
d’assurer la sécurité de Ousséni Compaoré et de sa famille parce que ses
éléments passaient et la femme était traumatisée. Je l’ai informé que Ousséni
était à Ouahigouya avec feu le Capitaine Laye Dihiré. Il a dit qu’il allait le
faire. Ce qui a abouti à son arrestation avec le Capitaine Laye Dihiré tous
deux détenus au Conseil de l’Entente dans une villa avec Ernest Nongma
Ouédraogo et le Commandant Abdoul Salam Kaboré. »
Zongo
Adama (I-315,
p3) : « Parmi les prisonniers qu’on gardait, et Diendéré Gilbert
venait de temps en temps voir si les hommes de garde sont là, il y avait Ernest
Nongma Ouédraogo, deux Sous-officiers de la base aérienne, un de ma classe Somé
(sans autre précision) qui était menotté et deux Libériens dont un teint clair
et l’autre tient noir ; je ne connais pas leurs noms. Les militaires de la
base aérienne étaient ensemble dans une pièce, Ernest Nongma dans une autre
pièce et les deux Libériens également dans une autre pièce. »
Kambou
Kabéa Grégoire (I-296, p2) : « Quand j’ai entendu les coups de
feu, conformément aux dispositifs sécuritaires qui avaient été mis en place, je
suis sorti avec mon fusil kalachnikov qu’on avait toujours sur nous, en
bandoulière et je me dirigeais vers le Conseil pour comprendre. Chemin faisant,
parvenu devant l’ancienne direction de la Caisse autonome de retraite des
fonctionnaires (CARFO) sur l’avenue qui passe devant l’Etat-Major de la
gendarmerie en allant vers l’hôpital Yalgado Ouédraogo, le Lieutenant Tibo
Ouédraogo, qui était d’ailleurs un promotionnaire de l’académie militaire,
arrivant en sens contraire, m’a stoppé. Il a insisté et je me suis arrêté. Il
était seul. Il m’a dit de rebrousser chemin parce que c’est dangereux, ce qui
se passe au Conseil, sans autre précision. J’ai fait demi-tour et j’ai rejoint
ma base à mon service. »
Mané
Kouka (I-375,
p2) : « Pendant que nous étions au rassemblement au Conseil la
nuit, j’ai vu le lieutenant Ouédraogo Tibo passer devant nous mais sans
s’adresser à nous. »
Bassorobou
Apiou Pascal (I-345,
p2) : « Dans les environs de 22 heures, Diendéré Gilbert est
venu aux transmissions. Il m’a fait transmettre un message à Pô demandant du
renfort qui est arrivé tard dans la nuit. J’ai vu le lieutenant à l’époque
Ouédraogo Ousséni, j’ai vu aussi Ouédraogo Tibo et beaucoup d’autres militaires
dont les noms m’échappent actuellement. »
Ouédraogo Abel Macaire (I-291, p3) : « (…) Comme
je vous l’ai dit, un adjudant que je ne connaissais pas est venu avec des
militaires du CNEC à notre base au camp CRS à Gounghin le 15 octobre 1987 vers
17 heures. C’est moi-même qui l’ai personnellement reçu et on a même échangé de
ce que je vous ai rapporté plus haut. Ensuite, ils ont investi notre camp.
C’est en ce moment qu’on m’a dit que c’est l’Adjudant Tibo. Il était réputé à
l’époque, mais moi je ne le connaissais pas physiquement. Ce n’était pas le 16
octobre 1987 mais bel et bien le 15 octobre 1987 au soir. Le 16 octobre 1987,
nous étions sous son commandement, d’ailleurs, depuis le 15 octobre 1987, dès
qu’il a investi notre camp. »
« Ensuite, il a ordonné un rassemblement
de tous nos éléments. Pendant que nous étions au rassemblement, nous apercevions
ses hommes venir de tous côtés. Certains ont escaladé le mur entrer. D’autres
sont rentrés par les diverses portes d’entrée et même en véhicules. Une fois au
rassemblement, il s’est exprimé de façon autoritaire. Il a dit : «Pour
compter de l’heure où nous sommes, c’est
moi qui prends le commandement ici. Si vous apercevez votre chef de corps
Sigué, vous l’abattez ». Ensuite, il a dit « retournez à vos postes »
en nous faisant appuyer par ses éléments militaires commando dans tout notre
dispositif »
Diarra
Ambroise Stanislas Amadou (I-421,
p5) : « Dans la nuit du 16 octobre, j’ai accompagné Ouédraogo Tibo au
Conseil de l’Entente. Il m’a même donné le mot de passe là-bas et nos éléments
de la FIMATS patrouillaient avec leurs éléments. Au Conseil, il m’a présenté à
Diendéré Gilbert qui m’a salué et m’a remercié du travail qu’on abat. Ensuite,
il m’a amené à la Cité An III, en face du canal, dans une villa où il y avait
une carte. Il m’a désigné un point sur ladite carte vers la frontière du Ghana
où Sigué Vincent venait d’être localisé. »
Daboné
Gérard (I-434,
p3) : « (…) Je n’ai plus revu Tibo dans la nuit du 15 octobre
1987 lorsqu’il m’a laissé avec ma moto à la porte du Conseil. Après le 15
octobre, sans pouvoir vous préciser la date exacte, je le voyais souvent au
Conseil de l’Entente où j’étais resté ; il venait et il repartait. Nos
éléments de l’EMC que j’ai vus le 16 matin aussi étaient là ; eux aussi
faisaient des mouvements. »
Tinto
Adama (I-256,
p2) : « Dans la nuit du 14 au 15 octobre, la veille du coup
d’état, l’ancien Commandant de la gendarmerie Palm Jean Pierre est venu rentrer
voir Blaise. Il a duré avant de repartir. »
Diallo
Moussa (I-253, p3) : « Je me
souviens aussi que quelques jours avant le 15 octobre 1987, le regretté Cissé
Drissa dit Kennedy, un ami du Colonel-Major Jean Pierre Palm avait déclaré à
une dame à Bobo qui l’a rapporté à nos services, que Blaise Compaoré va prendre
le pouvoir. Le 13 ou le 14 octobre, on a fait interpeler Cissé Drissa dit
Kennedy et le faire garder au PC du Groupement de gendarmerie de Bobo, avec interdiction de visite et de
communication. Son transfert sur Ouagadougou devait avoir lieu le 16 octobre
1987. »
Kaboré
Abdoul Salam (I-129,
p2) : « Seul au stade du 4-Août, j’ai rejoint quelques amis au
Génie militaire. Là, j’ai rencontré Sanou Bernard. Dans nos tentatives de
recherches pour comprendre ce qui se passait, on a appris que le Président
Thomas Sankara était assassiné. On a appelé au Conseil mais on n’a pu avoir personne.
Personne de Blaise Compaoré, Lingani, Henri Zongo. On a appelé Boukary Kaboré à
Koudougou et on a pu l’avoir. A l’ETIR, Koama avait été tué, c’est son adjoint
Elysée qu’on a eu. Il nous a dit qu’il essayait de rejoindre Boukary à
Koudougou. On a passé la nuit là-bas au camp de Gounghin. J’ai appelé le
Colonel Palm Mory Ardiouma Jean-Pierre qui m’a dit de venir au Conseil. J’ai
dit «non, je n’ai rien à faire au Conseil, j’ai appris que Thomas Sankara a été
tué ». Le 04 août, nous l’avons préparé ensemble dans les maisons non
éclairées de Ouagadougou. Je savais ce que je faisais, maintenant vous tuez
notre leader et vous me demandez de venir au Conseil. Non, je n’ai rien à faire
au Conseil. Peu de temps après, on est venu me chercher et on m’a embastillé au
conseil pendant huit mois je crois. Gilbert Diendéré était notre geôlier
d’ailleurs. »
Barry
Jean (I-435,
p2) : « En fait, le 15 octobre 1987, j’étais à Bobo-Dioulasso.
Je n’étais pas à Ouagadougou. (…) Le lendemain 16 octobre 1987, j’ai pris le
premier car de la compagnie Faso tours
et je suis rentré à domicile à Ouagadougou vers 13 heures. C’est là que ma
femme m’a relaté certains faits, à savoir que monsieur Jean-Pierre Palm est
arrivé chez nous, quelques temps après les coups de feu. (…) Quelques temps
après, Julien Keita qui travaillait à la CEAO, actuel UEMOA, fiancé de ma
première fille, est arrivé. Lui il était venu constater comment ça allait dans
la famille. Peu après, il a voulu retourner et ma femme a dit ‘’non’’. Il a dit
à Julien de rester car pour elle, il ne pouvait partir nous laisser seuls avec
Jean-Pierre Palm qui n’était pas un familier de la maison et qui était arrivé
là tout paniquer. (…) Elle m’a rapporté que le matin lorsqu’elle s’est levée,
Jean Pierre Palm n’était plus là ; par contre Julien était là. »
Palm Jean Pierre n’a donc pas passé la
nuit chez le vieux Barry comme il l’a déclaré lors de son premier
interrogatoire (I-418, p1)
Kaboré
Abdoul Salam (I-129,
p2) : « On m’a dit que le Colonel Palm a envoyé venir me
chercher. Arrivé au Conseil, on m’a mis dans une chambre et puis plus rien. On
m’a embastillé ce jour-là, et jusqu’à ce que je sorte sept ou huit mois après,
je n’ai vu personne, personne. Personne n’est venu me dire « on t’a arrêté
pour telle ou telle Praison » ; rien du tout. Une fois, par les
persiennes de ma porte, j’ai vu Palm qui rentrait et j’ai dit «Mon ami, tu
es enfin venu me voir ? » Il a dit qu’il allait voir Ernest avant de
revenir me voir, mais zéro. »
Da
Yao Adolphe : (I-235, p3) :
« L’une des dernières notes d’information du 15 octobre au matin, avait
trait au scénario de ce qui allait se
passer. La même note d’information, datant du 15 octobre 1987, nous a
été lue, nous les éléments du service de renseignements en présence de notre
chef Kaboré Tibo Georges par le Capitaine de l’époque Palm Jean-Pierre
lorsqu’il est venu à la gendarmerie après les événements. Ça devait être deux
ou trois jours après les 15 octobre.
(…) Il nous a présenté la note d’information,
puis l’a lue (…) Il a même dit que c’est l’un des derniers documents qui a été
retrouvé sur le bureau de Thomas Sankara. »
Dagano
Karim (I-447,
p2) : « (…) Comme l’exige la procédure, nous avons pris les
archives d’écoute concernant Blaise Compaoré et Palm Jean Pierre que nous nous
sommes partagées et avons procédé à leur destruction. Ce dernier, en personne,
est venu dans notre service, accompagné de Français, avant même de prendre le
commandement, à la recherche de preuves qu’il était sous écoute. Il a récupéré
toutes nos bandes d’enregistrement et toutes les archives, y compris une table
d’écoute portative qu’il a emportée avec lui je pense au Conseil de l’Entente.
La table elle-même a été désactivée puisqu’elle ne pouvait pas être emportée.
Elle était bien fixée et scellée. Notre chef de service, Douamba Boukari dit
Kadhafi, peut vous dire avec plus de précisions, ce qu’il a pu écouter ou
filmer les concernant. Par la suite, il a été mis aux arrêts à la salle C par
Palm Jean-Pierre. Il nous en voulait tellement qu’il nous a rencontrés pour
nous mettre en garde contre le nouveau régime (…) »
Zongo
Victor (I-447, p2) : «
Dès le lendemain 16 octobre 1987, si ma mémoire est bonne, Palm Jean Pierre est
venu, accompagné d’un Blanc qui serait un technicien, plus un autre qui serait
un Capitaine français dénommé Baril. Un des deux a suggéré à Palm Jean-Pierre
d’arrêter Douamba Kouliga Boukary, le chef de service de la technique
opérationnelle car il était très dangereux. Comment, pourquoi, on n’en sait
rien. Séance tenante, il a été arrêté puis conduit pour être enfermé à la salle
C. Ils ont inspecté la table d’écoute qui se trouvait au rez-de-chaussée du
commandement de la gendarmerie. Je n’ai pas su tout ce qu’ils ont fait là-bas.
Notre chef de service Kaboré Tibo Georges aurait déploré qu’on amène ces Français
découvrir et inspecter notre Service et nos installations qui avaient été
équipés par des Soviétiques et le personnel formé par les Russes, les Algériens
et les Cubains. »
Douamba
K. Boukari (I-449, p2) : «Notre chef,
le Lieutenant Tibo passait nous
encourager. Jusqu’au jour où le Capitaine Palm Jean Pierre est venu dans notre
bureau avec des Blancs, probablement des Français. Un d’entre eux a dit au
Capitaine Jean Pierre de m’arrêter je ne sais pas pourquoi, mais j’ai entendu.
Après ça, j’ai continué le service jusqu’au jour où, entre le 16 et le 18
novembre 1987, aux environs de 17 heures, j’étais au bureau, des gendarmes sont
venus m’arrêter et me conduire devant le Capitaine Palm Jean-Pierre, le
Lieutenant Bassolé Djibril et le Lieutenant Somé Gaspard. Ils étaient ensemble
dans leur QG à l’Escadron. Le Lieutenant
Bassolé Djibril a dit de me conduire à la salle C où j’ai été enfermé.
Il y avait beaucoup de gens déjà enfermé là-bas, des civils comme des militaires. »
Toé
Michel (I-392, p2) : « Je partais
travailler à l’infirmerie là-bas et quand je partais, je lui rendais une visite
de courtoisie. Ayant su que j’étais le petit frère à Fidèle Toé, un jour, Palm
Jean-Pierre m’a confié que leur coup du 15 octobre 1987 a échoué parce qu’ils
n’avaient pas eu Fidèle Toé mon frère. C’est lui qui devait confirmer le
complot de 20 heures contre Blaise Compaoré, justifiant leur action. Il m’a dit
qu’ils devaient avoir Fidèle pour confirmer le complot de 20 heures, lorsqu’ils
ont su qu’il ne faisait pas partie des douze personnes tuées avec le Président
Sankara. Ils l’auraient recherché en vain. »
Toé
fidèle (I-388, p3) : « Après
sept d’ans d’exil, j’ai pu revenir au pays où j’ai pu revoir certaines personnes, je cite
particulièrement le Colonel Palm Jean-Pierre de la gendarmerie à qui j’ai rendu
visite au mois d’août 1994. Il m’a révélé que j’avais bien fait de quitter ce
pays parce que eux, ils devaient me prendre et m’amener à confesser, à dire que
le Président Sankara s’apprêtait à les éliminer, Blaise Compaoré et eux, les
éléments de Blaise Compaoré, et c’est pourquoi eux ils ont pris les devants. Il
m’a dit qu’immanquablement, je devais parler dans ce sens et porter plus tard
une lourde responsabilité de ce mensonge. Que mieux aurait valu pour moi de
mourir après. »
Drabo
Adama (I-477,
p3) : « (…) C’est vrai, je confirme cela. C’est moi qui ai amené
Fidèle Toé chez Palm Jean-Pierre et c’est juste ce que Fidèle a dit. Palm
Jean-Pierre a effectivement dit qu’ils devaient l’amener à confesser que le
Président Sankara s’apprêtait à les éliminer et eux, ils ont pris les devants.
Palm lui a dit ça. Il a même ajouté que c’est Fidèle Toé qui leur manquait.
C’est comme ça que ça s’est passé. Palm est mon ami, il est gendarme et il
était mon chef. Mais c’est ce qui s’était réellement passe. C’est juste ce que
Fidèle a dit, c’est la vérité. »
Bicaba
Denis (I-97, p2) :
« Monsieur Tamini Gabriel est mon beau-frère, c’est le petit frère de ma
femme. Il a logé chez moi. Il est venu me contacter de la part de Blaise
Compaoré pour m’inviter à participer à un coup d’Etat. Je lui ai dit qu’étant
membre du CNR, je sais que, pour que Blaise fasse un coup d’Etat, il faut qu’il
élimine toute la superstructure pour pouvoir s’imposer. Je lui ai dit que
j’allais réfléchir, de revenir une semaine après. Quand on s’est revu, je lui
ai dit que j’avais participé au coup d’Etat du Conseil du salut du peuple (CSP)
et au coup d’état du CNR et que je n’étais plus prêt à participer à un coup
d’Etat. Je lui ai dit que j’étais prêt à démissionner de l’Armée, à quitter le
pays s’il le faut. Il est revenu trois jours après pour me dire qu’on lui a dit
de me dire que je sois d’accord ou pas, Sankara sera renversé. Ça doit être à
un mois et demi environ avant les évènements du 15-Octobre. »
Basile
Guissou (I-207, p5) : « En
tant que ministre, je décide d’assister à la conférence de Rédaction pour
préparer le journal parlé de 13 heures à la radio. J’y étais avec Jean Modeste
Ouédraogo, mon conseiller technique, qui était un ancien directeur de la radio
nationale. Dans la salle de réunion, se trouvait Gabriel Tamini les pieds sur
la table, fumant une cigarette. Tout le monde se lève pour saluer le ministre,
lui non. Jean Modeste lui fait l’observation. Il ne réagit pas. Je m’assois, je
commence la réunion sans tenir compte de lui. C’est l’exemple type de la
défiance ouverte vis-à-vis de nous. »
Tiendrebeogo
Issouf (I-353, p2) : « Le
militaire et celui qui était en tenue civile n’ont pas ouvert la bouche, seul
Gabriel Tamini m’a dit : «On a tué votre type. » Je n’ai pas
réagi. »
Guigma Emmanuel (I-361, p2) : « Le 15 octobre 1987, j’étais en tenue de sport et présent au service à la Radio nationale. J’étais là jusqu’à ce qu’on entende des coups de feu du côté de l’intérieur du Conseil de l’Entente, aux environs de 16 heures, presque 17 heures. J’étais dans la cour de la Radio. Avec les coups de feu, je suis rentré dans mon bureau qui était situé à droite, à l’entrée principale de la Radio (…) A un moment donné, Tamini Gabriel et Salif Diallo, accompagnés de militaires parmi lesquels le regretté Sergent Sanou Fidèle, ont fait irruption au CDM. Gabriel Tamini était le premier à parler ; il a dit qu’ «on a tué votre type-là posé là-bas ». On a crié quoi ? Salif Diallo a dû répéter ce que Tamini Gabriel avait dit. On était bouleversé, on ne savait pas quoi faire. »
Serge Théophile Balima (I-221, p7) : « Il y
avait des extrémistes tels que Gabriel Tamini qui fut Conseiller de Blaise
Compaoré pendant plus de 20 ans. Le 15 octobre, il se promenait avec un fusil
kalachnikov. Il tenait, m’a-t-on dit, des propos du genre «Allez-y voir votre
Thomas Sankara, il est couché là-bas comme un chien. Je peux citer également
Lingani Issaka, Traoré Yacouba, Michel Ouédraogo. »
Millogo Youssoufou (I-398, p2) : « Après le
15 octobre 1987, j’étais Secrétaire Général du ministère de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche scientifique avec Oumarou Clément Ouédraogo comme
ministre. J’avais été approché par Sanfo Flatié Victor et Traoré Etienne qui me
connaissaient. Le même Sanfo Flatié Victor m’avait également approché courant
septembre-octobre pour que j’héberge Tamini Gabriel chez moi parce qu’il se
sentait en danger. Il avait des difficultés, je ne maitrise plus lesquelles.
Ils ne m’ont pas dit davantage là-dessus. Je l’hébergeais chez moi depuis au
moins une semaine lorsque les évènements du 15 octobre 1987 sont intervenus.
(…) Une rumeur disait que Tamini Gabriel était menacé. Il était hébergé aux
domiciles de camarade en camarade. Ces rumeurs concernaient, je crois, Tamini
Gabriel et Sourwema Noël qui avaient fait une analyse à la radio disant que le
CNR déviait. D’autres pourraient avoir des éléments là-dessus et peut-être les
intéressés eux-mêmes. »
Zidwemba Rimbessom Claude François (I-85,
p2-3) : « (…) Ceux qui
étaient avec Kafando Hyacinthe, il y avait notamment Ouédraogo Otis, Nacoulma
Wampasba, Ouédraogo ou Sawadogo Idrissa, Tondé Bangré, un certain Yerbanga, Nabié
N’soni dit quatre roues, un jeune soldat du nom de Maiga sans autres
précisions. Ce Maïga est différent de l’ancien Maïga, chauffeur de Blaise
Compaoré. C’est eux que j’ai vu. Il semble qu’il y avait d’autres assaillants
derrière le bureau dont Ouédraogo Nabonséouindé. A notre arrivée, il y avait
certains qui étaient déjà là en tenue de sport. On ne savait pas que ça allait
se passer comme cela. Nacoulma Wampasba et Ouédraogo Nabonswendé étaient sur
place à notre arrivée. »
Lors de la
confrontation il maintient : « Effectivement, ce jour-là, je suis certain pour
Sawadogo Idrissa et j’ai les preuves. Lorsque Otis a pourchassé quelqu’un et
revenir tirer sur deux personnes je pense à Walilaye et à Somda Der couchés à
côté de moi pour les achever, Hyacinthe a crié sur lui de ne pas tuer les
enfants. C’est en ce moment que Sawadogo Idrissa est venu me donner un coup de
pied de me lever. Je me suis levé, il m’a conduit dans la chambre de la
sécurité, à côté de celle de Blaise Compaoré. Il y avait des armes à l’intérieur.
J’ai été ramené dans la chambre de Blaise Compaoré en attendant qu’ils
déménagent les armes qui s’y trouvaient. Il ne faisait pas encore nuit. Pendant
que j’étais dans la chambre de Blaise Compaoré, le téléphone sonna. J’ai hurlé
en disant d’avertir Hyacinthe parce que le téléphone sonne. Plus tard, ils sont
venus me sortir pour me ramener dans leur chambre où il y avait les armes
qu’ils ont déménagées. J’ai trouvé Ilboudo Laurent, Sow Drissa et Koala Abel
dedans. Ensuite, ils ont amené Traoré Alouna. Pour Yerbanga, je crois l’avoir
vu mais je ne peux pas vous en dire plus. »
Diarra Ambroise Stanislas Amadou (I-421, p4) : « En
revenant de ce constat, parvenu au mur de l’école après l’OFNACER, on me
conduit un groupe de militaires en tenue dont un se présente comme étant le
Sous-lieutenant Tibo. Ils ont été stoppés dans leur véhicule VLRA par nos
éléments qui étaient postés sur le mur à l’intérieur, dont Ouédraogo Abel
Macaire. Celui qui s’est présenté Sous-lieutenant Ouédraogo Tibo m’a dit, après
avoir demandé si Sigué était là, qu’il venait de l’ETIR pour nous appuyer. Il
était accompagné d’environ huit éléments, tous en tenue militaire et armés,
dont Albert Belemlilga que j’ai reconnu et à qui j’ai demandé s’il me
reconnait, il a dit non. »
Belemlilga Albert (I-357, p1-2) : « Lorsque
les tirs ont cessé, j’ai essayé de sortir la tête pour voir ; j’ai aperçu
Hyacinthe Kafando, Nabié N’soni dit quatre roues. J’ai rejoint mon unité qui
était basée en face du Conseil de l’Entente, de l’autre côté de la voie, non
loin du domicile de Diendéré Gilbert. C’est de là que nous avons reçu les
ordres de notre chef Ouédraogo Tibo pour aller à la FIMATS. Comme beaucoup
d’autres camarades de l’Escadron Motocycliste Commando (EMC), c’est comme ça
qu’on s’est retrouvé là-bas, nous qui étions membres des deux pelotons de l’EMC
de Ouagadougou, puisque chaque région avait un peloton de l’EMC, sauf
Ouagadougou qui en avait deux.
Belemlilga Albert (I-357, p3) : « Le 15
octobre 1987, c’est Tibo qui nous a briffés pour la prise du camp de la FIMATS
et a bel et bien conduit la mission. Au cours de la nuit, il est ressorti avec
deux filles policières comme garde-corps, dont la sœur de l’actuel
Colonel-Major Traoré Mamadou de la gendarmerie dans un véhicule Land Cruiser.
Je ne sais pas où il avait eu ça. Ça, c’est Daboné Gérard qui m’a dit le 15
octobre dans la nuit au camp de la FIMATS. Le lendemain 16 octobre, dans la
matinée, il y a eu un rassemblement au camp CRS. Il était là avec deux filles
policières. »
Daboné Gérard (I-360, p3) : « Au cours de la même nuit, j’ai été envoyé à
Kamboinsé chercher un officier à l’époque Traoré Morifing que j’ai amené au mess des officiers. Celui
qui m’a instruit de le faire, je ne me rappelle plus c’est qui. Il est venu à
la recherche de l’homme de la moto, parlant de ma moto de service et m’a dit de
la part du lieutenant Diendéré Gilbert, d’aller chercher un officier à
Kamboinsé et de le ramener loger au mess des officiers, en me donnant le numéro
de la chambre dont je ne me rappelle plus. Ce que j’ai fait comme expliqué à ma
première comparution. Quand j’ai fini, je suis parti rester au Conseil après
avoir rendu compte.»
Daboné Gérard (I-434, p2-3) : « J’étais à
l’intérieur du Conseil, je ne suis pas sorti pour une mission en ville. Je me souviens
avoir été envoyé, je ne sais plus par qui, pendant les évènements de Koudougou,
pour aller chercher un chef de poste qui était basé avant le croisement de
Koudougou pour l’amener à Sabou et le ramener. Le chef de poste était le
regretté Adjudant Nebié sans autre précision. Ce que j’ai fait. Je crois être
resté là-bas toute la journée avant de regagner le Conseil de l’entente et
après rien d’autre jusqu’à repartir. Dans ma mémoire, je n’ai pas effectué un
autre mouvement » ; « je n’ai plus revu Tibo dans la nuit du 15 octobre 1987,
lorsqu’il m’a laissé avec ma moto à la porte du Conseil. Après le 15 octobre,
sans pouvoir vous préciser la date exacte, je le voyais souvent au Conseil de
l’entente où j’étais resté ; il venait et il repartait. Nos éléments de l’EMC
que j’ai vus le 16 matin aussi étaient là, eux aussi faisaient des mouvements.
Je crois être resté avec mes camarades de l’EMC à leur base du côté du domicile
de Diendéré Gilbert. »
Diallo Moussa : « Par
exemple, Jean Pierre Palm, le frère de Jean Marc, utilisait Tamboura Moussa
Sous-officier de gendarmerie, pour ventiler des tracts à Koudougou où ce
dernier servait. Voilà un monsieur qui était proche du CMRPN affecté à Fada à
l’avènement du CSP. J’étais intervenu à sa demande pour qu’il soit affecté à
Ouagadougou. Compaoré Ousséni qui le connaissait a préféré l’affecter à
Koudougou. Lorsque Jean-Pierre Palm dont
il était proche lui envoyait des tracts pour ventiler, il prélevait et il
m’envoyait. J’étais informé avant même que la gendarmerie à Ouagadougou ne nous
fasse parvenir ces tracts. C’est après le 15 octobre que j’ai découvert que
c’était un pion de Jean-Pierre Palm au service de renseignements généraux de la Gendarmerie. Je
l’ai su parce qu’il s’est confessé à une connaissance à Bobo du nom de Sanoh
Mamady. Il l’a amené chez lui montrer dans une de ses cantines les fiches de
renseignements qu’il produisait contre nous et lui a dit que c’est lui qui
jetait les tracts du GCB à Koudougou pendant la révolution. »
Tamboura Moussa : « Mamady c’est l’ami intime de Diallo Moussa. Il travaillait à la SOFITEX de Bobo-Dioulasso. Mamady a eu des problèmes à la SOFITEX. L’enquête m’avait été confiée. C’est ainsi que Diallo Moussa m’a dit que c’était son ami. Il avait même perdu son boulot. La SOFITEX l’avait licencié. Je n’ai jamais amené Mamady chez moi, il ne connait pas chez moi. Il n’est jamais venu chez moi. Je vous jure que je ne lui ai jamais dit que je produisais des tracts ou que j’étais à Koudougou. Je jure au nom de Dieu et au nom du pèlerinage que j’ai effectué à la Mecque. Je ne lui ai jamais dit ça. (…) Palm Jean-Pierre on ne se fréquentait pas. A part les relations de gendarmerie. Je n’ai jamais reçu des tracts de lui pour ventiler à Koudougou. Je n’ai jamais été un pion de Palm Jean-Pierre. Quand il fut nommé commandant de gendarmerie, j’ai été muté au cabinet du commandement comme secrétaire et je travaillais régulièrement. Un jour, il a convoqué sept éléments de la gendarmerie parmi lesquels il y avait Ouattara Kiméné, Kadio Seydou, Ouédraogo Amadé et moi-même Tamboura Moussa. Il nous a notifiés qu’il allait nous envoyer en stage à Paris en France pour le renseignement. A notre retrour, nous n’avons pas été utilisés à cet emploi, car il y avait un malentendu entre lui et le Directeur général de la police à l’époque Sambaré Palguim. C’est ainsi que nous avons été dispersés et moi, j’ai été affecté à la brigade de recherche à Banfora. (…) Je jure que je n’ai jamais envoyé des tracts à Diallo Moussa ni à qui que ce soit. Où vais-je avoir ces tracts à Koudougou pour envoyer à mon supérieur ? Jamais de ma vie je n’ai envoyé des tracts à Diallo Moussa ni reçu des tracts de Palm Jean-Pierre. Je respecte Diallo Moussa jusqu’à un certain niveau mais là il m’a vraiment déçu. (…) En clair, les déclarations contenues dans le témoignage de Diallo Moussa sont des allégations contre ma personne, sans fondement et contre ma dignité et mon honneur. Mes rapports avec lui étaient de subordonné à chef. J’étais sous-officier, il était officier. C’est tout. Je souhaite même une confrontation. Parce qu’il est officier, il pense qu’on va prendre ça pour argent comptant et me condamner ou quoi ? »
Kaboré Boukari dit Le Lion : « Pour
impliquer tout le monde dans la sécurité de l’Etat, on avait demandé à la 5e
Région militaire, commandée par Blaise Compaoré, de se déporter sur Diébougou
pour sécuriser la frontière. Ce qu’il n’a jamais fait. Compte tenu de la
situation de l’époque, j’avais proposé au Président Thomas Sankara d’arrêter
Blaise Compaoré. Il a catégoriquement refusé en disant que nous ne devons pas
trahir l’amitié. Je lui ai dit que s’il mourrait, la révolution allait mourir
en même temps ; lui était convaincu que la révolution n’allait pas mourir. On a
tellement discuté, en définitive, je lui ai dit qu’il soit d’accord ou pas,
j’allais arrêter Blaise Compaoré. C’est là qu’il me dit qu’il s’oppose
catégoriquement parce que les gens ne nous comprendront pas et que si
j’insistais à toucher à un poil de Blaise, nous n’allons plus nous parler
jusqu’à la fin de nos jours. Ça, c’était à Koudougou dans mon salon. J’en ai
discuté encore avec Thomas à Ouagadougou au Palais lorsqu’on avait toutes les
informations claires qu’il allait être tué par Blaise. Nous avons discuté de 19
heures à 23 heures. Il n’était toujours pas d’accord. Les esprits ont fini par
s’échauffer. Il a fini par me dire de laisser Blaise nous tuer et les gens vont
parler de ce que nous on a fait demain. Je n’étais pas prêt pour qu’on tue
Blaise, je voulais simplement qu’on l’arrête pour résoudre le problème. J’ai
dit à Sankara qu’il était déjà un cadavre et qu’on n’accompagne pas un cadavre.
S’il voulait mourir, il n’a qu’à mourir seul. On s’est séparé. Entre temps, il
m’a appelé pour me dire que je parle de mourir, mourir que c’est moi qui vais
mourir avant lui en faisant allusion au plan A de Blaise Compaoré. »
Salifou Diallo : « J’étais
son chef de cabinet, je prenais des notes. J’ai cru à cette thèse jusqu’en
février 1988 lorsque Blaise m’a dépêché avec une lettre écrite de sa main pour
remettre à un chef d’Etat africain de la sous-région. Quand il a pris la
lettre, il a ouvert devant moi. Lorsqu’il a fini de lire, il a dit ceci : c’est
comme cela quand on s’attaque aux vieillards. Il reste le bâtard d’Accra. Je
n’ai rien compris. Je suis rentré. J’ai rendu compte à Blaise qui m’a dit à peu
près ceci : si tu répètes ces propos ailleurs, même avec toute l’armée
burkinabè, je ne pourrai pas te protéger. Au fil du temps, certains éléments me
sont revenus à postériori. Par exemple, le 6 ou le 7 octobre, Blaise a tenu une
réunion avec Zèba Dasmané du CENATRIN, Kaboré Casimir de l’Armée de l’Air et un
homme blanc que je ne connaissais pas. Ils sont arrivés vers 11 heures, je suis
descendu les laisser et lorsque je suis revenu au bureau à 15 heures, j’ai trouvé
qu’ils venaient de finir. Après le 15 octobre, un matin, on m’annonce la mort
de Zeba, puis plus tard de Casimir, des morts brutales. Ce qui m’a amené à me
poser des questions sur la thèse du complot de Thomas Sankara, notamment s’il y
avait vraiment complot et s’il n’y avait pas de lien entre cette réunion et la
mort de Thomas Sankara. C’est ce que je peux dire de ce que je sais du 15
octobre 1987. »
Pitroipa Amado : « Après
coup, selon les informations, il y aurait eu une planification de concert avec
des pays comme la France, la Côte d’Ivoire et même la Lybie. Pour la France
j’avais discuté avec Valère (Somé) qui m’a dit que Mitterrand avait essayé
d’alerter Thomas Sankara. Pour lui, ce n’était pas le France de Mitterand mais
l’aile de la droite française chiraquienne, les FOCCART. »
Tondé Ninda Pascale dit Mang-naba : « Le
Capitaine Diendéré Gilbert que je conduisais à l’époque n’est pas sorti hors du
Conseil, moi-même je ne suis pas sorti hors du Conseil. Je ne peux pas dire les
détails de ce qu’on a fait à l’intérieur ce jour, ça fait longtemps, j’ai
oublié. (…) le Capitaine Diendéré Gilbert ne m’a pas envoyé faire une course
quelconque pour lui »
Que
concernant Compaoré Blaise (en fuite), selon les nombreux témoignages, il était
chez lui au moment de l’attaque et après l’attentat, les assaillants sont allés
le chercher après lui avoir rendu compte au téléphone immédiatement de
l’exécution de la mission ; que tous les témoignages recueillis concordent à
dire que la mort de Thomas Sankara était programmée et que plusieurs personnes
étaient déjà au courant ; que certaines personnes ont même tenté de prévenir le
Président Sankara afin qu’il prenne toutes les dispositions pour parer à son
meurtre prochain ; que le Capitaine Blaise Compaoré, après la mort du Président
Sankara, a déclaré dans la même soirée, dans une proclamation lue à la
radio-télévision nationale, l’instauration du régime du Front populaire avec
lui-même comme président, et que le comité national de la révolution que
dirigeait Thomas Sankara et son gouvernement étaient dissouts. Qu’il apparait
comme le commendataire de ce coup d’Etat et de l’assassinat du président
Sankara ainsi que des douze autres personnes tuées au moment de
l’attaque ; que les assaillants étaient tous de sa garde rapprochée ; que
d’ailleurs ils sont immédiatement allés le chercher après l’attentat lui
rendant compte de la mission accomplie.
Attendu que
dans une note diffusion restreinte, datant du 5 novembre 1987, déclassifiée par
le ministère de la Défense française, le capitaine Blaise Compaoré commentait
la mort de Sankara et le coup d’état du 15 octobre 1987 en ces termes
(I-397.200) : « Les divergences avec Sankara étaient devenues nombreuses depuis
un an. Zongo, Lengani et moi-même allions lui demander de démissionner. Nous
avions envoyé quelqu’un auprès du père de Sankara afin que celui-ci tente de le
raisonner. Cette démarche avant la rupture n’a eu aucun résultat.
Les
divergences étaient nombreuses. Le pays, l’Etat et l’armée étaient engagés dans
une impasse. Entouré d’une bande d’idéologues qui lui faisaient faire n’importe
quoi, il s’était enfermé dans l’exercice du pouvoir personnel. Il avait créé
l’OMR (Organisation Marxiste Révolutionnaire), composée essentiellement de ses
gardes du corps qui siégeaient, au titre de l’OMR au CNR. Depuis plusieurs
mois, il pratiquait le népotisme en favorisant ses proches. Il avait prévu de
nous faire arrêter tous les trois : Zongo, Lengani et moi le jeudi 15 octobre à
20 heures. Devaient agir Vincent Sigué et d’autres hommes de main de la garde
et de la FIMAT (Force d’intervention du ministère de l’Administration
territoriale). J’en ai été avisé par des membres de la garde présidentielle qui
ont appartenu à mon unité. Connaissant l’homme, j’ai pris cela très au sérieux.
Je n’ai jamais approuvé les actions violentes qu’il avait fait commettre. Mais
je n’en ignore aucune et je connaissais donc sa détermination, il avait fait
abattre le Colonel Somé, le Commandant Guebré. Le chef d’Etat-major adjoint
Sawadogo ; le restaurateur d’Abidjan Séraphin Kinda. Il n’a pas hésité à faire
déposer une bombe à Yamoussoukro. Il était disposé à nous faire exécuter. Je
voulais me retirer à Pô. Avec Zongo et Lengani nous avions pris comme seule
disposition de ne jamais nous retrouver ensemble tous les trois au même
endroit.
Le 14 au
soir, nous avons tenté une dernière fois de le raisonner. Nous nous sommes
réunis tous les quatre à 19h30. Il est parti en claquant la porte et en
précisant qu’il ne voulait plus jamais discuter avec nous.
Mes hommes
savaient le danger qui me menaçait. Dans l’après-midi du 15 octobre alors que
j’étais à mon domicile, près de l’ambassade de France, ils ont décidé d’agir,
avec à leur tête, l’un de mes principaux adjoints, un lieutenant. Ils ont
investi le « Conseil de l’Entente » vers 16h avec l’intention d’arrêter
Sankara. Quelques-uns des gardes du corps de Sankara ont ouvert le feu et mes
hommes ont répliqué. Il a été tué à 16h20. C’est à mon domicile que les hommes
m’ont avisé que « l’affaire est réglée ». Je pensais alors qu’il l’avait été
arrêté. Ce n’est qu’en arrivant au « Conseil de l’Entente » que j’ai constaté
les faits. J’ai été profondément choqué et il a fallu des heures avant de
réagir. Le seul ordre que j’ai donné a été de faire enlever les corps. Je n’ai pas
voulu sa mort et c’est vraiment un drame. Il était allé trop loin, n’écoutait
plus personne et nous étions tous les trois menacés, Zongo Lengani et moi. Nous
ne voulions que sa démission ».
Qu’il fut
d’ailleurs le premier à qui les assaillants ont
rendu compte de l’exécution de la mission ; que c’est aussi de chez lui
que le commando a démarré en direction du lieu où se tenait la réunion pour
commettre leur crime ;
Qu’il sied
dès lors dire que les éléments constitutifs du crime d’attentat à la sureté de
l’Etat sont constitués à l’encontre de Blaise Compaoré ;
Que
concernant Diendéré Gilbert : il déclare que tout le monde savait que le climat
s’était détérioré entre Blaise Compaoré et Thomas Sankara ; qu’il y avait des
rumeurs imminentes d’attaque du « Conseil de l’Entente » par le camp Sankara
contre Blaise et inversement ; que le 15 octobre 1987 dans la matinée une
réunion dirigée par lui-même a été tenue pour tenter de calmer les gens ; que
cependant cette réunion n’a concerné que les éléments de Blaise Compaoré ;
qu’il déclare que : « il faut dire que le climat n’était pas bon à l’époque. Il n’y avait pas
seulement que l’ETIR de Kamboinsé. Il y avait aussi la FIMATS. Les rumeurs
disaient qu’ils voulaient attaquer le Conseil, compte tenu du climat qui prévalait
à l’époque et déloger les éléments considérés proches de Blaise Compaoré » ;
que ces deux
unités, l’ETIR et la FIMATS, étaient commandées par Koama Michel et Sigué
Vincent, tous deux retrouvés quelques jours plus tard mort exécutés ;
Que Diendéré
ajoute « Je sais qu’avant le 15 octobre 1987, il y avait une crise
socio-politique qui était là. Je ne peux pas vous en donner les détails. Il y
avait aussi les rumeurs d’une attaque imminente du Conseil de l’Entente. Ce qui
a conduit à ce qui s’est passé le 15 octobre » ;
Attendu que
pourtant étant responsable de la sécurité des lieux, Diendéré Gilber n’a pris
aucune disposition pour mieux sécuriser le « Conseil de l’entente » ; qu’il
n’était même pas en état d’alerte, mais au contraire vaquait naturellement à
ses activités : qu’il précise qu’au moment des tirs il se rendait au terrain de
sport ; que le dispositif pour renforcer la sécurité au « Conseil de l’Entente
» n’a été déployé qu’après l’attentat ; qu’il déclare que le piquet
d’intervention qui était en place au « Conseil de l’Entente » au moment et
après les tirs au lieu de tenter d’arrêter, à défaut de combattre et
neutraliser les assaillants, s’est plutôt déporté auprès des postes de gardes
pour renforcer la sécurité afin d’empêcher toute attaque extérieure ; « Il y a
toujours un piquet d’intervention. Sa réaction a été de renforcer les postes de
garde pour parer éventuellement à l’attaque des éléments de Kamboinsé » ;
Qu’il déclare
également qu’après les tirs, c’est ce qu’il s’est affairé à faire : « j’étais
retourné au niveau de la permanence pour essayer de calmer les gens. Parce que
lorsqu’il y a eu les tirs, les soldats étaient paniqués. Ça courait partout. Il
fallait que le commandement soit à côté pour essayer de les calmer. Il y avait
aussi l’information selon laquelle, il y avait une attaque qui viendrait du
côté de Kamboinsé avec l’Escadron de Transport et d’Intervention rapide (ETIR)
commandé par le Lieutenant Koama Michel qui, apparemment, avait l’intention
d’attaquer le Conseil de l’entente. Il fallait que le commandement soit là pour
dire aux soldats de rester à leurs postes ». (I 209, I 414, I 457, I 445).
Attendu
qu’après l’attentat, Diendéré Gilbert a également géré le cas des personnes
arrêtées et détenues comme prisonniers :
Que du témoignage de Traoré Morifing, il
ressort ceci « Quand nous sommes arrivés au Conseil, j’ai été reçu par le
lieutenant Diendéré Gilbert qui m’a fait comprendre que j’étais en arrestation
pour des raisons de sécurité. J’ai été ensuite conduit à la gendarmerie
nationale au camp Paspanga où j’ai trouvé beaucoup de membres du gouvernement
révolutionnaire à l’époque dont Somé Valère, Train Raymond Poda, Ouédraogo
Youssouf. J’ai fait deux ou trois nuits. Le lieutenant Sawadogo Laurent qui
était à la compagnie est venu me dire qu’il a reçu un coup de fil du lieutenant
Diendéré Gilbert, que je devais repartir au « Conseil de l’Entente ». Quelque
temps après, le véhicule du lieutenant Diendéré Gilbert est venu me chercher
avec son conducteur, un certain Bekaye si je ne me trompe pas. Arrivé au
Conseil, j’ai été reçu par le lieutenant Diendéré Gilbert qui m’a expliqué
qu’après recoupement des différentes informations me concernant, ils ont décidé
de me libérer » ;
Que le témoin
Kaboré Abdoul Salam également déclare «
Peu de temps après, on est venu me chercher et on m’a embastillé au
Conseil pendant huit mois je crois, Gilbert Diendéré était notre geôlier
d’ailleurs » ; (I 129)
Attendu que
Traoré Alouna rescapé de la tuerie déclare « Le sentiment que j’ai, est que
nous sommes entrés au Conseil dans un dispositif préparé qui nous attendait. Ça
s’est passé très vite et il n’y a pas eu de riposte. Ensuite, il fallait
rechercher et neutraliser tous les éléments à l’extérieur et dans les environs
qui pouvaient essayer de riposter ».
Qu’en effet
plusieurs personnes ont été immédiatement à la suite de l’attentat recherchées,
exécutées et détenues pendant des mois durant ; que Diarra Ambroise Stanislas
Amadou qui était officier de police à la FIMATS déclare que « Dans la suite de
ce qu’on me demandait, j’ai été sollicité par Diendéré Gilbert et Ouédraogo
Tibo que j’ai rencontrés au Conseil et qui m’ont demandé de travailler à
retrouver Kaboré Boukary dit le Lion qui serait rentré selon leurs informations
à Ouagadougou » ; qu’à l’instar de Traoré Morifing ; Kaboré Abdoul Salam qui
eux ont été fait prisonniers, Koama Michel quant à lui a été exécuté à
Kamboinsé presqu’au même moment que la tuerie au « Conseil de l’entente ».
Sigué Vincent et Sanogo Elysée, tous proches de Sankara, ont été traqués et
exécutés pour parer à toute éventuelle riposte. Que Diendéré lui-même déclare
qu’il s’attendait à ce que le « Conseil de l’Entente » soit attaqué par les
unités commandées par ces deux officiers Koama Michel et Sigué Vincent et qu’il
a dû prendre les dispositions pour parer à cela ;
Que plusieurs
éléments de l’Escadron motocycliste commando ont été envoyés à la FIMATS pour
désarmer les policiers de cette unité que commandait Sigué Vincent ;
Que plus
tard, des déclarations des hommes appartenant à la FIMATS, il ressort que des
jours après le 15 octobre 1987, Gilbert Diendéré est passé les féliciter, les
encourager et il était même question de leur donner des promotions en grade
pour n’avoir pas pris les armes contre le coup d’Etat.
De toutes les
personnes (inculpés et témoins) entendues par le juge, seul Diendéré Gilbert a
fait cas du complot de 20 heures qui fait l’objet d’une note confidentielle des
services secrets français. Cette note sur les « aveux » de Compaoré Ousséni a
été produite en février 1988 alors que l’intéressé était détenu au Conseil de
l’Entente sous la responsabilité de Diendéré Gilbert. Toutes les autres
personnes entendues au sujets du complot de 20 heures affirmaient que c’était
une intervention de derrière minutes pour justifier l’injustifiable ; que ce
complot n’a jamais existé ;
Attendu que
Diendéré Gilbert au regard de tous ces éléments apparait à l’instar de Blaise
Compaoré comme un des commanditaires de l’attentat à la sureté de l’Etat ;
qu’en effet comme l’a déclaré Blaise Compaoré lui-même dans une conversation
privée du 5 novembre 1987, « cette tension n’a pu être apaisée lors de la
réunion du jeudi 15 octobre au matin, réunion organisée par le responsable de
la sécurité du Conseil. Elle devait dégénérer dans l’après-midi lorsque les
éléments de la sécurité du Conseil, opposés à l’exécution du complot de 20
heures, décidèrent de prendre les devants » ; qu’il ajoute « Dans
l’après-midi du 15 octobre alors que j’étais à mon domicile, près de
l’ambassade de France, ils ont décidé d’agir avec à leur tête l’un de mes
principaux adjoints, un lieutenant. Ils ont investi le « Conseil de l’Entente »
vers 16 heures avec l’intention d’arrêter Sankara.
Que Diendéré
lui-même reconnaissait que c’est bien de lui dont le capitaine Blaise Compaoré
faisait allusion en parlant du responsable de la sécurité… (I-414) ;
Qu’à
l’analyse, on peut noter que suite à la réunion organisée par Diendéré dans la
matinée du 15 octobre 1987, soit dit, dans le but d’apaiser les tensions, la décision
a été prise d’arrêter le président de la République Thomas Sankara avant 20h ce
jour. Et donc d’exécuter un Coup d’Etat, l’attentat à la sureté de l’Etat ;
Qu’il s’en
suit que Diendéré était parfaitement au parfum des évènements à venir dans
l’après-midi du 15 octobre 1987 ;
Que
l’attentat était bien préparé à tel point que tout son dispositif de
sécurisation ne s’est immédiatement mis en place qu’après la fusillade du
président Sankara, notamment par l’assassinat des officiers proches du
président Sankara qui auraient pu vouloir s’opposer au coup d’Etat après son
assassinat.
Que
concernant Kafando Hyacinthe (en fuite) il était le chef de mission commando ;
que sous sa direction, les militaires comme Ouédraogo Nabonsseouindé, Nacoulma
Wampasba, Yerbanga Salam, Sawadogo Idrissa, Ilboudo Yamba Elysée ont embarqué
dans deux véhicules pour aller exécuter le président Sankara et ses camarades.
Qu’il était de la garde rapprochée de Blaise Compaoré ; que tous les témoins
l’ont reconnu et identifié comme celui qui dirigeait et cordonnait l’attaque ;
que selon Diendéré Gilbert il serait même le donneur d’ordre dans l’attentat
contre le président ; « Commanditaire, je n’en sais rien, donneur d’ordre j’ai
entendu dire que c’est Hyacinthe Kafando » ; qu’il est constant que Kafando
Hyacinthe commandait les assaillants ;
Que la
coïncidence de certains faits parachèvent de persuader de la planification et
de l’exécution des évènements du 15 octobre 1987, qu’il en est ainsi par
exemple de la simultanéité des attaques du secrétariat du CNR au Conseil de l’Entente
tuant le président Thomas Sankara et douze autres par le groupe de Kafando
Hyacinthe, de la prise de la FIMATS par Ouédraogo Tibo et de la mort de Koama
Michel à Kamboinsé, localité située hors de la ville de Ouagadougou à l’époque
attribuée à Somé Gaspard, de l’arrivée en renfort le même soir d’éléments venus
de Pô commandés par le lieutenant Bonkian Alain, des raisons non établies par
aucun éléments du dossier notamment d’un coup contre Compaoré Blaise le soir du
15 octobre à 20 heures, soutenu dans les différents discours officiels des
nouveaux dirigeants putschistes ;
Que la
responsabilité pénale peut résulter de faits matériels ou de faits
intellectuels objectifs ; qu’en effet, l’on peut être responsable pénalement en
accomplissant matériellement le fait répréhensible, en étant auteur
intellectuel ou à l’origine de tels faits ;
Qu’à supposer
même la responsabilité directe de Compaoré Blaise, de Diendéré Gilbert et de
Ouédraogo Tibo non établie, contrairement au cas d’espèce ; qu’en ne prenant
pas de mesures pour empêcher les faits et après leur commission pour
sanctionner les auteurs de la mort de celui qu’ils ont appelé leur meilleur ami
et de ses compagnons, en ne les mettant pas à la disposition de la justice pour
des poursuites appropriées, le Général Diendéré Gilbert, Compaoré Blaise,
Ouédraogo Tibo au-delà de tout doute
raisonnable, engagent leur responsabilité pénale indirecte en vertu de leur
qualité de chefs militaires ; que Diendéré Gilbert soutient, lui, qu’il avait
rendu compte au Commandant Lingani Jean Baptiste ; que mieux les membres du
commando ont été protégés et jouissaient de privilèges notamment d’impunité
dans tous leurs actes même ultérieurs.
Attendu
qu’outre l’action militaire qui a visé à changer le régime légal et légitime
établi du gouvernement du Burkina Faso, ayant consisté à « neutraliser », par
les armes, le chef de l’Etat Thomas Sankara et ses compagnons, une déclaration
du Front populaire, nouvel organe dirigeant du pays, signée du capitaine Blaise
Compaoré était lu par le lieutenant Traoré Omar, dès la soirée du 15 octobre
1987, annonçant la proclamation de l’avènement du Front populaire, la
dissolution du Conseil national de la révolution (CNR), du gouvernement, la
démission du Président du Faso de ses fonctions, etc. ; Que le Lieutenant
Traoré Omar déclare (I-187 et I-205) qu’il a personnellement reçu des mains de
Blaise Compaoré des feuilles blanches où il avait écrit un texte d’aller lire,
ledit document manuscrit, écrit de ses propres mains ; qu’après lecture aux
environs de 19 heures, compte rendu lui a été fait après lecture ; que celui-ci
l’aurait ramassé du fait que quelques secondes se sont écoulés entre la fin de
la lecture du texte et l’énoncé de son nom Blaise Compaoré ; que Blaise
Compaoré adressait lui-même un message à la nation, quatre jour après, le 19
octobre 1987, pour justifier les homicides du 15 octobre 1987 au Conseil de
l’entente (scellé n°2, I-65) ; que d’autres communiqués du Front populaire
suivront avec comme signataire Blaise Compaoré sur les ondes de la RTB
notamment ;
Attendu qu’en
agissant ainsi, volontairement et en
toute conscience, en violation des dispositions des articles 1er et 2 de la loi
n°16 AL du 31 août 1959 relative aux atteintes à la sureté de l’Etat et les
articles 313-1, 313-2, 313-4 du code pénal actuel en l’espèce ensemble et de
concert, en prenant ou faisant prendre les armes, en procédant ou faisant
procéder par la force des armes à des tirs sur la personne du Président du Faso
Thomas Sankara, Président du Comité national de la révolution, et sur douze
autres personnes composées de sa garde rapprochée et de membres du cabinet
spécial, causant leur mort instantanée, en prononçant la dissolution du
gouvernement, en proclamant l’avènement du Front populaire, en procédant à des
arrestations et emprisonnements ciblés de personnes proches du Président Thomas
Sankara, (…) »
Et voilà ! Place au procès.
Source :
Ordonnance du juge d’instruction